3 décembre 2010

L'incident du Carnival Splendor

Balcons d'un navire de croisière Carnival


Le feu représente certainement le pire scénario pour l'équipage et les passagers d'un navire de croisière.  Grâce aux matériaux utilisés aujourd'hui et aux normes de sécurité maritime très strictes, il est très rare qu'un tel incident ne survienne.  Malheureusement, c'est ce qui est arrivé le 8 novembre 2010 à bord du Carnival Splendor, un navire de croisière de la compagnie Carnival Cruise Lines.  Le navire transportant 3299 passagers et 1167 membres d'équipage devait effectuer une croisière de 7 jours sur la riviera mexicaine mais la croisière a pris un tournant inattendu moins de 12 heures après son départ de Long Beach en Californie lorsqu'un incendie s'est déclaré à bord.

Voici un résumé des événements d'après ce qu'a raconté le directeur de croisière du Carnival Splendor.  Tout commença le lundi matin vers 06h00 alors que l'équipe de lutte contre les incendies fut appelée à se rendre à la salle des machines située à l'arrière sur le pont 0.  Le capitaine, Claudio Cupisti, demanda aussitôt au directeur de croisière, John Heald, de le rejoindre sur la passerelle de navigation.  Dans une situation d'urgence, c'est normalement le directeur de croisière qui assure la communication avec l'équipage et les passagers au moyen de l'interphone.  Les passagers furent immédiatement informés de la présence de fumée dans la salle des machines arrière, et tous les membes d'équipage furent priés de se rendre à leur postes d'urgence respectifs.  Peu après, l'odeur de fumée devenant de plus en plus perceptible à l'intérieur, le capitaine demanda à tous les passagers de quitter leur cabine et de se rendre sur les ponts extérieurs.  Un appel fut lancé à la garde côtière américaine.

Entre-temps, le capitaine fut informé qu'il s'agissait d'un feu de câbles électriques et que la fumée était si intense qu'elle empêchait quiconque de s'approcher du foyer d'incendie.  Après avoir ordonné l'ouverture des grandes portes situées de chaque côté du navire au niveau de la mer dans le but d'évacuer le plus de fumée possible, le capitaine prit la décision d'évacuer la salle des machines et d'utiliser le CO2 pour éteindre définitivement l'incendie.  La fumée fut ensuite évacuée par les puits de ventilation.  Ce n'est qu'après une inspection que la permission fut enfin donnée aux membres d'équipage de quitter leur postes d'urgence ainsi qu'aux passagers qui le voulaient de regagner leur cabine.

Personne ne se doutait alors de ce qui les attendait par la suite...jusqu'à ce que le chef ingénieur annonce au capitaine la perte définitive du panneau électrique central.  Sans électricité, cela signifiait que le navire était sans propulsion, sans éclairage, mis à part un très faible éclairage d'urgence, sans ascenseurs, sans climatisation, sans téléphone ni internet, et sans toilettes fonctionnelles, tous les systèmes de chasse d'eau étant élecriques.  À un moment donné, le capitaine dut même interdire l'accès aux toilettes publiques et prier les passagers de n'utiliser que les toilettes de leur cabine tellement la situation était grave.  Les ingénieurs furent capables de remettre en marche l'alimentation électrique des systèmes de chasse d'eau dans la matinée du mardi,  mais pour le reste il était définitivement impossible de remettre le courant et de repartir les machines.  Le navire était condamné à dériver sur l'océan.  Sans électricité, cela voulait dire également aucun repas chaud, aucun breuvage chaud, et des divertissements réduits au minimum.  Les passagers ayant des cabines avec balcons pouvaient bénéficier de la clarté du jour et d'un peu d'air frais, mais ce n'était pas le cas de ceux ayant des cabines intérieures.  La nuit, à cause de l'absence de climatisation, plusieurs passagers et membres d'équipage n'eurent guère le choix de dormir dans les couloirs, dans les lieux publics ou directement sur les ponts extérieurs.  Le mardi matin, un navire de la garde côtière américaine et un porte-avion de la marine américaine arrivèrent en renfort avec des vivres.  Les palettes furent déposées sur les ponts à l'aide d'un hélicoptère.  Un remorqueur arriva aussi pour remorquer le navire.  Finalement, le navire arriva au port de San Diego vers 08h30 le jeudi matin.  En tout, trois jours et trois nuits sur un navire sans électricité, à manger des salades et des sandwiches...

Malgré les conditions difficiles avec lesquelles les 4466 personnes à bord furent confrontées et les vacances gâchées de 3299 passagers, l'incident n'a fait aucun blessé.  De plus, il est important de souligner le courage et le travail extraordinaire effectué par l'équipage du Carnival Splendor:  le directeur de croisière qui informa sans cesse les passagers de la situation, parfois même avec un brin d'humour, et qui voulut s'assurer que personne ne manquait de rien; les chefs et les cuisiniers qui tout de suite après l'incendie durent préparer environ 9000 sandwiches pour le repas du midi en moins de deux heures; le capitaine qui refusa de manger avant que tous les passagers et tous les membres d'équipage aient été nourris; les membres d'équipage qui formèrent des chaînes humaines dans les escaliers afin d'assurer le transport des vivres et de divers objets; d'autres qui distribuèrent des bouteilles d'eau et des couvertures pendant que tout le monde attendait sur les ponts extérieurs dans les premiers instants; d'autres enfin qui patrouillèrent sans cesse afin de rassurer les passagers et de s'enquérir de leur bien-être.  Il fut rapporté également que beaucoup de membres d'équipage s'étaient surpassés et que la majorité d'entre eux avaient continué à travailler avec le sourire.

Je tiens aussi à mentionner les compensations et les dédommagements que Carnival Cruise Lines a eu la gentillesse d'offrir à tous ses passagers à bord du Carnival Splendor.  Personne n'espérait autant de leur part, et de tels dédommagements aussi généreux ont rarement été vus dans l'industrie du voyage.  Ainsi, après que tout danger fut écarté, la compagnie décida de faire bar ouvert et de supprimer tous les frais sans exception portés aux comptes des passagers depuis le tout début de la croisière...même les frais reliés à l'achat d'une montre suisse à la boutique ou d'une bouteille de vin à $500 à la salle à manger...  La compagnie s'est occupée de faire les arrangements pour le transport aérien au départ de San Diego pour tous les passagers, et a même offert une nuit d'hôtel gratuite à San Diego à tous les passagers qui le désiraient.  Carnival Cruise Lines remboursera les frais de transport aérien, y compris le vol effectué pour se rendre au port d'embarquement, en plus de rembourser intégralement le prix de la croisière.  Et pour terminer, chacun se verra offrir une croisière gratuite à faire d'ici deux ans.

Les médias ont surtout mis l'emphase sur le côté tragique et malheureux de l'incident.  On a parlé de "croisière de l'enfer" et certains ont vite condamné et accusé Carnival Cruise Lines.  Il est certain qu'un tel incident n'est souhaitable pour personne.  Toutefois, de nombreux passagers ont su témoigner de l'entraide et de la solidarité qui régnaient à bord, du travail héroïque de l'équipage et de la façon extraordinaire dont Carnival Cruise Lines a traité la situation.  Certains ont même affirmé que cette expérience seule les conduira à choisir à nouveau une croisière avec Carnival Cruise Lines.  Quand au navire endommagé, toutes les croisières qu'il devait assurer sont annulées jusqu'à la mi-janvier.

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